KHARTOUM (Reuters) - L'aviation soudanaise a bombardé lundi une ville du Nord-Darfour contrôlée par la rébellion, ont rapporté des groupes insurgés peu après l'annonce d'une enquête gouvernementale sur une attaque meurtrière de la guérilla contre une base militaire en août.
L'annonce de l'attaque d'Haskanita intervient sept semaines avant des pourparlers de paix en Libye entre Khartoum et les groupes rebelles. Elle coïncide avec de nouveaux appels de l'Onu à un arrêt des hostilités avant l'arrivée d'une force mixte de l'Onu et de l'Union africaine comprenant 26.000 hommes.
Aboubaker Mohamed Kadu, l'un des chefs de l'Armée de libération du Soudan-Unité (SLA-Unity), a déclaré que des avions Antonov et des hélicoptères de combat des forces gouvernementales avaient attaqué Haskanita et que des unités terrestres avaient ensuite pénétré dans la ville vers 12h00 GMT.
Selon Abdelaziz el Nour Acher, du Mouvement pour la justice et l'égalité (JEM) qui dispose aussi de combattants dans la ville, les rebelles ont repoussé l'attaque terrestre au bout de trois heures.
"Nous avons capturé 50 soldats gouvernementaux et un général", a-t-il déclaré à Reuters. "Le gouvernement ne cherche qu'à nous chasser de nos régions. Il n'est pas intéressé par des pourparlers de paix."
Il a ajouté que sept combattants des forces unies de la SLA-Unity et du JEM avaient péri dans l'attaque. "Nous ne connaissons pas encore le nombre des victimes civiles."
Les autorités militaires soudanaises n'ont fait aucun commentaire jusqu'ici.
Un porte-parole de l'Union africaine (UA), dont un petit nombre de soldats sont stationnés à Haskanita, a dit avoir été informé de combats dans la ville, ajoutant que des officiers s'employaient à les vérifier.
On ignore si l'attaque constituait une opération de représailles à un raid du SLA-Unity et du JEM lancé fin août contre une base gouvernementale située à un peu plus de 200 km à l'est d'Haskanita.
MISSION EN FRANCE
Le ministère soudanais de la Justice a annoncé lundi l'ouverture d'une enquête sur six membres du JEM qu'il soupçonne d'avoir planifié ce raid, qui a fait 41 morts à Wad Banda, dans la province du Kordofan occidental, voisine du Darfour.
Les experts internationaux estiment que 200.000 personnes ont péri en quatre années d'affrontements au Darfour, vaste région occidentale du Soudan. Ils évaluent à 2,5 millions le nombre de personnes déplacées par le conflit. Khartoum avance un bilan de 9.000 tués.
Le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, a lancé dimanche un appel à l'arrêt des combats au terme d'une visite de six jours qui l'a conduit au Soudan, en Libye et au Tchad. La priorité, a-t-il dit, est de tout faire pour que le maximum de groupes rebelles participent aux pourparlers en Libye.
Riek Machar, vice-président de la région autonome du Sud-Soudan, s'est envolé dimanche soir pour la France avec une équipe de responsables politiques pour tenter de persuader Abdel Wahid Mohamed el Nour, fondateur du Mouvement de libération du Soudan basé à Paris, de prendre part aux négociations.
Ce dernier a toujours refusé jusqu'à présent, réclamant au préalable la cessation des hostilités.
"Ils sont partis pour le convaincre de rejoindre le processus de discussions", a déclaré le ministre du Sud-Soudan pour les Affaires présidentielles, Luka Biong.
Mark Malloch Brown, émissaire du Foreign Office britannique arrivé lundi à Khartoum pour une visite de 24 heures au Darfour, a déclaré à Reuters que Londres et Paris faisaient également pression sur Nour afin qu'il participe aux discussions.
Un autre chef rebelle, Suleiman Jamous, a indiqué lundi qu'il attendait toujours l'autorisation de prendre un avion pour le Kenya afin d'y subir un traitement médical, six jours après la promesse du président soudanais Omar Hassan el Bachir de le laisser partir.
Jamous, coordonnateur humanitaire de l'Armée de libération du Soudan, est assigné de fait à résidence dans un hôpital géré par les Nations unies près du Darfour, depuis plus d'un an.