La Cour de cassation a estimé mardi illégale l'adoption au sein de couples homosexuels, jugeant la renonciation à l'autorité parentale qu'elle implique pour la mère biologique contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant.
Les deux arrêts de principe, appelés à faire jurisprudence, rendus par la plus haute juridiction sont néanmoins perçus par les défenseurs des homosexuels comme une incitation au législateur à se saisir de la question et non comme un jugement sur la capacité des couples de même sexe d'élever un enfant.
La Cour a également estimé que la délégation ou le partage de l'autorité parentale accordé après l'adoption à la mère naturelle par la mère adoptante n'était pas possible.
Plusieurs tribunaux et cours d'appel, comme à Amiens le 14 février, ont avalisé ces derniers mois ces deux démarches, utilisées par les couples homosexuels pour contourner l'absence de reconnaissance de leur droit à l'adoption et ainsi établir leurs droits de parents sur les enfants de l'un des membres du couple.
La 1ère chambre civile de la Cour de cassation, présidée par Jean-Claude Ancel, était saisie de pourvois contestant deux arrêts, l'un rendu le 13 avril 2006 par la cour d'appel de Bourges et l'autre rendu le 6 mai 2004 par la cour d'appel de Paris.
Le premier avait accepté de valider l'adoption d'un enfant par la compagne de sa mère biologique.
La juridiction suprême a estimé que la cour d'appel, en procédant ainsi, avait violé les dispositions du code civil car elle avait privé "la mère biologique, qui entendait continuer à élever l'enfant, de ses propres droits".
Elle a donc cassé la décision prise en avril 2006.
Le deuxième arrêt, rendu par la cour d'appel de Paris, avait rejeté la possibilité d'un partage ou d'une délégation de l'autorité parentale par la mère adoptante à la mère biologique après l'adoption.
La Cour de cassation a confirmé cette décision, considérant que la délégation ou le partage de l'autorité parentale est "à l'égard d'une adoption, antinomique et contradictoire, l'adoption d'un enfant mineur ayant pour but de conférer l'autorité parentale au seul adoptant".
Dans un communiqué, Me Caroline Mécary, l'avocate du couple concerné par la décision rendue à Paris, a regretté que la plus haute juridiction "n'ait pas reconnu que les enfants élevés par deux parents du même sexe aient les mêmes droits que les enfants issus d'un couple hétérosexuel".
L'Interassociative lesbienne, gaie, bi et trans (Inter-LGBT), a relevé avec satisfaction que les décisions de la Cour de cassation n'étaient "pas un jugement sur la capacité des deux femmes à élever un enfant".
Dans une décision rendue en février 2006, la Cour a en effet estimé que le code civil ne s'opposait "pas à ce qu'une mère seule titulaire de l'autorité parentale en délègue tout ou partie de l'exercice à la femme avec laquelle elle vit en union stable et continue, dès lors que les circonstances l'exigent et que la mesure est conforme à l'intérêt supérieur de l'enfant".
Dans les arrêts rendus mardi, "la Cour de cassation vient simplement de rappeler que le débat (ndlr: sur l'adoption) ne peut être tranché que par le législateur", souligne l'Inter-LGBT.
L'Association des parents et futurs parents gays et lesbiens (APGL) estime elle aussi qu'il est "urgent que le législateur s'empare de ces questions".
"La nouvelle législature qui suivra l'élection présidentielle de mai 2007 devra oeuvrer rapidement pour que ces enfants bénéficient des mêmes protections que les autres", affirme-t-elle dans un communiqué.